Lorsque des couples consultent pour obtenir un diagnostic sur leur infertilité, ils découvrent parfois qu’ils sont des enfants Distilbène.

Si on connait mieux les affections qui perturbent la fertilité d’un couple, il est encore difficile d’expliquer l’origine de ces anomalies.

Les questionnaires et les examens permettent généralement de situer le problème, et bien souvent de le solutionner.

L’origine peut être psychologique, relever d’une mauvaise hygiène de vie, d’une altération génétique, ou de toute autre raison. Depuis plusieurs années, des personnes apprennent que leur singularité est la conséquence d’un traitement médical prescrit à leur mère. Ils entrent alors, dans le groupe de plus en plus important des « enfants Distilbène ».

Que veut dire ce mot, et, quelles conséquences envisager pour les prochaines générations ?

L’origine du Distilbène : Pourquoi a-t-on préconisé le Distilbène ?

Le Distilbène est le nom commercial d’un médicament ; en France, il fut prescrit dès l’année de sa découverte, en 1938, et jusqu’en 1977, l’année de son interdiction pour les femmes enceintes. Son nom scientifique est diéthylstilbestrol. Il s’agit d’une puissante hormone de synthèse, qui agit directement sur les œstrogènes. Ces dernières sont des hormones sexuelles femelles.

Ce produit, plus communément appelé DES, fut préconisé aux femmes qui subissaient des avortements spontanés et répétitifs, ou des accouchements prématurés.

Au début des années 1950, de nombreux obstétriciens du monde entier appliquèrent des cures répétées de DES, durant la période de gestation des patientes présentant des risques d’avortement. Et au fil du temps, la législation autorisa son utilisation dans les cas d’hémorragies du premier trimestre de la grossesse, du traitement du diabète, et dans certains cas de stérilité.

Quelles sont les conséquences du Distilbène ?

En 1953, une étude de W.J. Dieckmann prouva l’inefficacité du DES, dans tous les cas de figure où il avait été préconisé aux femmes enceintes. En 1970, une première étude alerta le monde sur les cas de cancer du vagin (adénocarcinomes à cellules claires), des filles de mères ayant suivi un traitement de DES lors de leur grossesse.

À partir de 1971, les agences de santé commencèrent à interdire son utilisation aux femmes enceintes, ou susceptibles de le devenir. En France, on estime que 200 000 femmes ont suivi un traitement codifié par le Distilbène, entre 1951 et 1977, lors de leur gestation.

Depuis plusieurs décennies, le taux anormalement élevé de malformations génitales, chez les enfants nés de mères traitées au DES durant leur grossesse (connu sous le terme, « enfants Distilbène »), confirme la nocivité du produit sur le fœtus :

Pour les filles Distilbène :

  • Les malformations génitales typiques (l’utérus en particulier, et tubaires).
  • Des anomalies vaginales.
  • Les cas de stérilité sont plus élevés que pour le reste de la population.
  • Les risques de cancer du vagin sont accrus.

Pour les garçons Distilbène :

  • Des malformations de l’urètre (hypospade), l’orifice se trouve anormalement positionné sur la face inférieure du pénis, et non à son extrémité. Selon une étude récente du professeur C. Sultan (CHRU de Montpellier), le risque est entre 40 et 50 fois plus élevé que pour le reste de la population.
  • Des kystes de l’épididyme, une maladie qui affecte le conduit conservant puis participant à l’expulsion des spermatozoïdes.
  • Des testicules non descendus (cryptorchidie), des cas d’hypotrophie testiculaire, ainsi qu’un appauvrissement qualitatif du sperme (oligospermie).

Des perspectives qui ne rassurent personne :

Les fœtus exposés aux cures de Distilbène entre 1940 et 1977, sont entrés en âge de procréer à partir des années 1960 ; ils le seront jusqu’aux environs de l’année 2015.

Dans les consultations des spécialistes de la santé, les cas sont de plus en plus évidents. Lorsqu’un couple vient chercher des réponses à son infertilité, le thème de cet antécédent familial fait partie du questionnaire habituel.

Malheureusement, on constate que la génération suivante est atteinte des mêmes anomalies génitales. Le saut générationnel, donnent naissance aux « petits enfants Distilbène ».

Les problèmes génitaux, et, les problèmes de stérilité de ces enfants devenus adultes, est un authentique problème de santé publique.